Il offre trois hommes en cadeau à sa femme pour Noël avant de les enterrer vivants; son voisin de bureau voit son sexe disparaître; devant une galerie d’art, un vagabond mort est transformé en oeuvre unique; un collègue de travail se marie avec une ourse; les vacances sont distraites par les embarcations des migrants qui se noient, « mais ce sont les vacances« ; un jeu « de société » consiste à provoquer des accidents sur une autoroute avec le moins de matériel possible… Mais quel est ce monde où l’on oublie ses enfants, où l’on tue ses vieux, où l’on joue, tristement, le comédie du sexe? En 25 scénettes sardoniques, crues, cruelles, l’auteur des « Ames Grises » se mue en satiriste du monde contemporain. Le cinéaste sensible de « Il y a longtemps que je t’aime », « Tous les Soleils », « Avant l’hiver », « Une enfance » se transforme là de émule de Bataille ou de Sade. Se moquer de ce monde cruel qui est le nôtre est-il licite? Imaginer des parcs de pauvres que l’on visite comme des lieux de tourisme, est-ce aller trop loin? Philippe Claudel se moque des conventions, des habitudes, des limites imposées par la morale. Gageons que son récit grinçant, lucide, drolatique nous obligera à garder les yeux ouverts. Tonique, en vérité.

Inhumaines de Philippe Claudel (Stock, 130 pages, 16,50 €).