Rouart et la femme fatale

Article du 24 janvier 2017

Rouart et la femme fatale

« Une jeunesse perdue »: le titre est trompeur. On aurait pu penser à « le Goût du Malheur », s’il n’avait déjà été pris … par Jean-Marie Rouart lui même. Ce roman ci aurait pu se nommer « la Femme Fatale ». Car c’est bien de cela qu’il s’agit : un homme d’âge (très) mur, dirigeant une revue d’art, obsédé par la volonté d’aimer et de plaire encore rencontre la demoiselle qui va causer son malheur. Elle est belle, jeune, russe, elle a commis un méchant article sur Balthus que tout rédacteur en chef censé aurait refusé. Ce que commence par faire notre héros… avant de rencontrer la belle ingénue. Il va vite en tomber amoureux. Follement. Eperdument. Déraisonnablement. Acceptera même de rémunérer ses services. « Comme vous comprenez bien les femmes« , lui glisse alors la brûlante Valentina Orlov. Cette longue descente aux enfers de l’amour, Rouart la conte avec passion, fièvre, sensibilité, ménageant ses effets. L’art joue son rôle, de Bacon à Giotto, du Bernin à Utrillo. Mais les beaux lieux de Paris aussi, du Flore à Lipp, de Caviar Kaspia aux jardins du Ranelagh. Il y a aussi un week-end à Florence, de franches rasades de vodka et de sancerre rouge. Rouart sait vivre, boire, rêver ou voyager autant qu’écrire. Son héros ira au bout de son malheur, qui lui est une manière de bonheur. Le lecteur, lui, ne s’ennuie pas un instant, vite fasciné par les embûches qu’évite à peine le narrateur. Roué Rouart!

Une jeunesse perdue de Jean-Marie Rouart (Gallimard, 176 pages, 19 €).

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Publié le 24 janvier 2017 par

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