L’aveu de faiblesses de Frédéric Viguier

Article du 11 janvier 2017

L’aveu de faiblesses de Frédéric Viguier

On avait été bluffé l’an passé par les « Ressources inhumaines » de Frédéric Viguier: une sorte de récit en deux temps sur l’irrésistible ascension et  la chute (?) d’une stagiaire de grande surface devenue responsable de son magasin. Froideur apparente, efficacité cinglante, description au scalpel: c’était une réussite de débutant. Avec « Aveu de Faiblesses », l’apprenti romancier est devenu un maître. On débute ses deux cent pages tard le soir et c’est l’insomnie garantie: impossible de s’endormir avant d’avoir achevé sa lecture. Le héros? Yvan Gourlet, fils d’ouvrier, dans une banlieue du Nord, proche de Lille, moqué par les gosses de son quartier, différent, qui se trouve laid, n’est aimé que de sa mère, a pour passions la menuiserie mais aussi la collection des boîtes de camembert qu’il déniche dans les poubelles de l’usine voisine. Le problème est qu’un soir un gosse de son voisinage est assassiné à coup d’herminette… de menuisier et que celui-ci, comme son frère, se moquait de lui.

Fabriquera-t-on un coupable parfait ? C’est ce que raconte Viguier avec une efficacité redoutable et une totale maîtrise du récit. Il y a les flics (Morlat/Grochard) qui jouent « good cop/bad cop », avec une rigueur effarante, la description clinique de la garde à vue, la recherche non de preuves, mais des aveux, plus la prison, la rédemption… On n’en dira pas plus de peur de déflorer l’issue finale façon double détente à la Boileau-Narcejac. On est ici entre le récit social et le roman policier, le thriller moderne et la description de la société contemporaine et sa critique féconde, notamment avec les personnages secondaires de choc, avocats plus ou moins motivés, juge et psychologue concernés, patron d’usine et homme politique en devenir. Tous ici sont mis en scène avec brio, mis en cause avec acuité. On croit le livre inspiré de tel ou tel faits divers et l’on se dit qu’on s’est laisser posséder par maître Viguier qui a tout inventé. Chapeau bas, maestro !

Aveu de faiblesses de Frédéric Viguier (Albin Michel, 216 pages, 18 €).

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Publié le 11 janvier 2017 par

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