Auberge chez Guth
« Steige : connaissez-vous Guth ? »
Yannick Guth © GP
Vous ne connaissez pas encore Yannick Guth ? Montez vers Steige, tout près du col qui embrasse d’un coup le Ban de la Roche et le Val de Villé. C’est le pays du kirsch et des eaux de vie, des pâturages où paissent bovins ou cochons noirs. Yannick Guth, natif de Saint-Maurice aux justes abords, s’est établi avec son épouse bretonne, dans ce coin de petite montagne vosgienne paradisiaque.
Amuse-gueule © GP
Sabayon à la choucroute © GP
Nous sommes là dans une ancienne ferme-auberge remise à neuf en version contemporaine, avec clarté et chaleur. La carte s’édicte suivant des menus aux altitudes différentes. On peut choisir les vins en accords ou préférer ceux de la carte. Yannick, 27 ans, qui a travaillé chez Julien à Fouday, la Villa à Calvi, avec Sébastien Sévellec, les Flocons de Sel de Megève avec Emmanuel Renaut ou encore l’Alpaga dans la même commune savoyarde, joue sa partition à lui: originale, montagnarde, alsacienne.
Foie gras poêlé au maïs © GP
La maison © GP
Sabayon à la choucroute au poivre Sarawak, foie gras poêlé au croustillant de pop corn, velouté de maïs, pointes de coing, oeuf croustillant en chapelure noire, pomme de terre fumée, frite de polenta, au sapin, magret de canard cuit au foin avec patate douce citronnée, jeunes carottes confites, jus au lichen comptent une histoire, suggèrent un chemin, détaillent un itinéraire. Qu’on a envie de poursuivre avec la truite des Guidat avec ses gnocchi ou le lapin au gratin dauphinois.
Oeuf croustillant en chapelure noire © GP
Magret cuit au foin © GP
En issue, c’est crème et glace au panais, plus croustillant chocolat ou encore « tout chocolat », avec neige d’écorce, glace au poivre noir Sarawak. Bref, c’est un peu fou, buissonnier, enivrant, comme les montagnes d’ici, qu’accompagnent des vins norme (chardonnay de Bohn, muscat ou sylvaner de Ruhlmann, mercurey du château d’Etroyes, rouge Pico Chuco des Maury en Languedoc, épousant le chocolat). Allez-y voir de près: c’est, bien sûr, « la » découverte du moment dans une Alsace un peu magique.
Tout chocolat © GP
Panais en crème et glace © GP
Après un rendez-vous manqué à Pâques, saison que je privilégie pour découvrir des tables, je suis allé en ce dimanche soir chez Yannick Guth. Je pense avoir trouvé ce soir, comme je l’ai dit à Yannick à la fin du repas, un point d’ancrage en Alsace, un lieu où revenir régulièrement, dès que possible, comme, d’ailleurs, mes voisins de table néerlandais. Un chef adorable, humble, enthousiaste, et un service charmant. Le produit est au coeur des préoccupations du chef, avec une appropriation toute personnelle et cohérente, claire, du terroir et de ses possibles : sabayon céleri, vinaigre de café, chips pomme de terre / tomates, féta, bouillon de lavande, herbes sauvages / oeuf, crème de pommes de terre fumées, oxalys, fleurs sauvages / une superbe truite cachuètes avec un condiment carotte cardamome, plat osé mais superbe, avec une sauce aux baies de sansho / une délicieuse poire de boeuf rôtie sur du sapin, croûte de cacao amer, purée de fèves, framboises et jus réduit d’herbes sauvages / assortiment de fromages / prunes dans une crème légère aux baies de siltimur et céleri (il arrive même à me faire aimer le céleri, parfaitement dosé ici pour un pré-dessert génial) / myrtille, crumble, crème glacée reine des prés, crème acidulée à la reine des prés.
Le tout pour 68 euros. Un beau sancerre de Vincent Gaudry accompagne le tout, avec une carte des vins qui gagnera peut-être à proposer des bouteilles en adéquation avec la qualité des plats.
En tout cas, ne ratez pas ce rendez-vous, sans omettre la beauté du lieu, avec un point de vue imprenable sur les Vosges et la vallée.
Un coup de coeur amplement mérité et une table qui pourrait faire pâlir bien des étoiles…