Jean-Pierre Xiradakis, alias Xira, vous le connaissez fort bien: il est l’aubergiste zélé de la Tupina, le petit Bonaparte bordelais de la rue de la Porte de la Monnaie, où il possède bar-cave, maison d’hôtes, épicerie-comestible, café-QG d’amis, table chic et choc, taverne grecque – on en oublie! Cette grande gueule finaude a une passion de moins en moins secrète: il marche, court le monde, débroussaille les chemins de vigne, refait, dans la lignée de Jacques Lacarrière (avez-vous lu le magnifique Chemin Faisant?), l’itinéraire de sa vie au long des chemins qu’il s’invente. Dans son nouvel opus, qui prend des allures d’épitaphe, de témoignage définitif, de testament, d’hommage aux origines, il lie ses chemins de prédilection à travers les vignobles du Grand Midi, depuis les marges bordelaises (de St Ferme dans l’Entre-Deux-Mers) et cadurciennes (ah, le repas de truffes avec les Pébeyre!) à la Provence en majesté, vers l’Italie, à travers la Toscane, puis la Crète- dont Lacarrière disait qu’elle n’était « pas une île, mais un continent« .

Xira raconte avec chaleur, simplicité, franchise, sincérité, évoque avec doigté les amis rencontrés au long de ses pérégrinations, se gausse d’une serveuse peu amène dans un café, s’interroge sur la géologie, les cépages, l’histoire, ce faisant sur l’avenir des hommes, leur passé, leur devenir, rend hommage à quelques vignerons rebelles (on pense aux pages dédiées à François des Ligneris, le farfadet complice de l’Envers du Décor à Saint-Emilion, cf p. 75, 76). Sa petite marche souple, fidèle, régulière (4 km par heure et environ 20km par jour) révèle un sentiment de fidélité, de sûreté, d’aveu. L’hommage final à son père lui arrache, comme à nous, des larmes d’émotion. Voilà un bien joli livre-compagnon.

PS: nota pour une réédition, Jean-André Charial à Baumanière s’écrit avec un seul « r » (cf. p 77 et 84, et c’est bien Jean-André, pas Jacques-André, comme p.77).

Marche à pied… de vigne, de Jean-Pierre Xiradakis (Féret, 175 pages, 17,50 €)