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Les chuchotis du lundi: le divorce Robuchon-Magrez, Mamo à Paris, Maurey sort de l’ombre, Maximin quitte Cagnes, Faye joue double jeu, le Cygne rachète l’Arnsbourg, la mort-mystère d’Etienne Hugel, l’empire Bucher reconstitué

Article du 18 avril 2016

Le divorce Robuchon-Magrez

Bernard Magrez © GP

Bernard Magrez © GP

Du rififi à Bordeaux: Bernard Magrez, qui a fait ses comptes et estime avoir perdu 2,4 millions d’euros depuis son ouverture (additionnant les coûts d’achat du bâtiment, du restaurant et de l’hôtel) de sa Grande Maison. Jusque là, Joël Robuchon  jouait le rôle d’ambassadeur des vins du groupe Magrez à travers le monde – ils étaient récemment ensemble à Shanghai pour l’ouverture, le 26 mars, en compagnie de Jean-Pierre Raffarin, de la nouvelle table du grand Joël au Bund 18. Leur collaboration bordelaise n’aura duré qu’un an et demi. Leur divorce s’annonce fracassant. Influencé notamment par son ami Michel Ohayon du Grand Hôtel, qui, lui, ferme le midi son Pressoir d’Argent étoilé, Magrez – dont le groupe pèse la bagatelle de 600 millions d’euros –  a décidé que Bordeaux n’avait pas de clientèle suffisante pour alimenter une table trois étoiles. La « Grande Maison » avait, pourtant, reçu ses deux macarons dès la première année d’activité et la 3e semblait poindre à l’horizon. Elle affichait complet tous les soirs – avec une trentaine de couverts seulement et seulement six chambres pour une demande  bien plus importante – et devait s’agrandir d’une neuve verrière. La maison, dont le devenir n’est pas encore fixé, devrait proposer un menu à 40 € au déjeuner et à 60 € au dîner, bien en deçà de l’actuelle formule robuchonienne, avec son armada de chefs créatifs. Dans l’équipe de JR, on affirme très clairement: « Magrez n’a rien compris à la grande cuisine. Il pense que faire le pain nous-mêmes et proposer un grand chariot de pâtisseries est une hérésie coûteuse« . En Espagne, au moment où son ex partenaire lançait son communiqué officiel, Joël Robuchon n’a pas souhaité réagir. Son entourage assure qu’il entend demander des comptes à son ex partenaire. Il a, en tout cas, fait une proposition de rachat du restaurant, restée jusqu’ici sans réponse…

Mamo à Paris

Mamo © GP

Mamo © GP

Il est la star italienne de la côte, recevant le tout Cannes version festival, c’est à dire le tout Hollywood en goguette et sa banlieue transalpine, de Sylvester Stallone à Leonardo di Caprio, en passant par Al Pacino ou Robert de Niro, dans son antre chic de la rue des Cordiers à Antibes. Où l’on vient croquer pizzas aux truffes, jolies pâtes, divins légumes à l’huile d’olive et superbes viandes grillées. Peppino Mammoliti dit « Mamo », déjà présent avec son fils à New York, ouvre une table fin mai à Paris où il transportera sa gaîté, son talent, sa malice, son savoir-faire. Ce sera dans le 16e arrondissement, tout près de l’Etoile, en lieu et place de l’Etc de Christian Le Squer qui fut étoilé. Le décor sera bouleversé, transformé, revu avec gaité sous la gouverne de Benjamin Patou du groupe Moma, déjà présent au Victoria 1836 et chez Manko. Et doublé d’une terrasse de douze couverts. Ouverture prévue: fin mai.

Maurey sort de l’ombre

Olivier Maurey au Champeaux © GP

Olivier Maurey au Champeaux © GP

Jusqu’ici, il jouait l’homme de l’ombre. PDG de Luderic, dédié à l’événementiel, associé d’Alain Ducasse chez Benoît et aux Lyonnais, patron de l’Ami Louis, créateur du Mini-Palais, de Ralph’s, du Café des Concerts, sans omettre la restauration du golf de Saint-Cloud, Olivier Maurey multipliait  jusqu’ici les affaires avec discrétion, sachant trouver le bon chef (il a associé Eric Fréchon au Mini Palais dont l’exquise popote est assurée par son disciple Stéphane d’Aboville). Au Champeaux, signé Alain Ducasse, sous la Canopée des Halles, c’est lui qui est aux manettes, visse les boulons, opère les derniers réglages. Lundi dernier, le jour de l’ouverture, AD était absent le midi, mais Maurey bien présent, déjeunant avec Sylvie Hubac, ex dir’cab de François Hollande à l’Elysée, et présentement présidente de la Réunion des Musées nationaux (qui gère notamment le Grand Palais). Son prochain projet: transformer les derniers étapes du Printemps en vitrine du goût des terroirs français, cumulant grande épicerie et belle table pour tous. Ce sera pour 2017…

Maximin: adieu à une légende

Jacques Maximin avec son épouse Josy à Cagnes © AA

Jacques Maximin avec son épouse Josy à Cagnes © AA

Il fut la star de la Côte d’Azur au Chantecler du Négresco dans les années 1980. Tenta l’aventure à son compte, à Nice, dans l’ancien théâtre de la ville, devenu depuis la brasserie Flo, puis Georges (aujourd’hui fermé), au Diamant Rose de la Colle-sur-Loup, avant d’ouvrir table à son nom dans sa propre maison de Vence, puis de faire son come-back dans un bistrot gourmand – un temps étoilé – de Cagnes-sur-Mer. Né à Ran-du-Fliers (Pas de Calais), formé aux Evens à l’Hermitage de la Baule sous la houlette de Christian Willer, puis à la Bonne Auberge d’Antibes avec Jo Rostang et chez Roger Vergé au Moulin de Mougins, fameux pour sa courgette fleur farcie aux truffes, Jacques Maximin, qui fut aussi le conseiller, à Paris, d’abord de Régine chez Ledoyen, puis de Rech, la table poissonnière de son ex compagnon du route du Moulin, Alain Ducasse, vient de vendre sa maison de Cagnes. Nicolas Bruneau et sa compagne Héloïse, qui en sont les nouveaux propriétaires, pensent ouvrir début mai. Ils garderont le nom « Bistrot de la Marine » dans une formule de bistrot chic mais décontractée avec des prix raisonnables. Pour Jacques Maximin, à 68 ans, une page se tourne. Mais on sait que, tel le phénix, il renaît toujours de ses cendres…

Arnaud Faye, consultant à Paris

Arnaud Faye © DR

Arnaud Faye © Auberge du Jeu de Paume

On l’a annoncé la semaine passée: Arnaud Faye, le chef deux étoiles de la Table du Connétable de l’Auberge du Jeu de Paume à Chantilly remplace Ronan Kervarrec à la Chèvre d’Or d’Eze Village. Dans le même temps, il sera le conseiller culinaire d’un  neuf hôtel parisien, décoré par Sarah Lavoine, qui ouvre fin juin, au 28 rue Saint Roch (« le Roch Hôtel & Spa« ). Il comptera 37 chambres et suites, à deux pas de la rue Saint-Honoré, donc de l’hôtel Mandarin Oriental, dont Arnaud géra, il y a peu, la seconde table (le Camélia), sous la houlette de Thierry Marx. Nostalgie de Paris? Ou astucieuse manière de garder deux fers au feu? On sait qu’à la Chèvre d’Or, depuis le long règne d’Elie Mazot, la valse des chefs a été continue depuis 1998, avec Jean-Marc Delacourt, Philippe Labbé, Didier Elena – qui a fait un passage éclair -, Fabrice Vulin et le dernier en date Ronan Kervarrec, parti depuis pour Plaisance à St Emilion…

Une chambre du Roch Hotel © Roch Hotel & Spa

Une chambre du Roch Hotel © Roch Hotel & Spa

Les Mengus rachètent l’Arnsbourg

Laure et Fabien Mengus © GP

Laure et Fabien Mengus © GP

Pour les gourmets de « l’intérieur », ce sont sans doute des noms difficiles à prononcer et leur géographie n’est pas non plus évidente. Si on vous dit que les Mengus du Cygne à Gundershoffen (Bas-Rhin, Alsace) rachètent l’Arnsbourg (Moselle, Lorraine) aux Klein, ce sera-t-il clair ? On vous avait, déjà, tout expliqué il y a quinze jours (voir nos chuchotis du lundi 4 avril). Le communiqué publié mercredi 13 par les trois parties (Jean-Georges Klein désormais à la Villa René Lalique, Cathy Klein qui n’a pas encore dévoilé ses projets, Fabien et Laure Mengus qui tiennent toujours leur Cygne deux fois étoilé, racheté à Annie et François Paul il y a seulement quatre ans), n’est donc qu’une confirmation d’un accord pris il y a quelques semaines. Objectif pour les Mengus, qui n’ont tous deux que 33 ans: retrouver au moins deux macarons dans la clairière d’Untermuhlthal, dans l’ex-demeure trois fois étoilée, distante de 11,7 km de leur maison actuelle. Pour ce faire, ils ferment – pour travaux de rafraichissement – l’Arnsbourg dès le 17 avril et annoncent une réouverture avec une nouvelle équipe, mais Fabien aux fourneaux, pour début août.

La mort-mystère d’Etienne Hugel

Etienne Hugel, Romain Iltis, Jean Trimbach le 20-09-15 chez Lalique © GP

Etienne Hugel, Romain Iltis, Jean Trimbach le 20-09-15 à la Villa Lalique © GP

Tout le vignoble alsacien ainsi que le monde de la haute gastronomie pleurent la disparition d’Etienne Hugel, à 57 ans. Ce digne héritier d’une maison illustre et de sa figure historique, son oncle Jean, qui fit tant pour sa gloire, était à la fois le directeur commercial du domaine Hugel à Riquewihr, son porte-drapeau, son héraut en communication. Fin septembre, il le représentait d’ailleurs avec faconde à la Villa René Lalique, lors d’un repas de prestige organisé par Silvio Denz et James Suckling, qui lauréa d’un coup de coeur l’une des grandes cuvées de la maison (le formidable riesling grains nobles cuvée S 2009). Remarié avec la sommelière japonaise Kaoru, dont il était très épris, père de deux grands enfants, Charlotte et Jean-Frédéric, Etienne faisait montre de son allant, de son dynamisme, de sa constante joie de vivre. Cela cachait-il une profonde dépression? Ses proches parlent de « burn out« . Si le pourquoi de sa mort demeure un mystère, on sait juste qu’il a projeté sa voiture sous un train à la hauteur de Ostheim, le 9 avril dernier. Un acte désespéré dont on peine à comprendre le sens. Toutes nos condoléances à sa famille.

L’empire Bucher reconstitué

Mathieu Bucher © GP

Mathieu Bucher © GP

Son père, Jean-Paul Bucher, se définissait comme un « restaurateur de restaurants« . Il avait créé le groupe Flo, en rachetant une première brasserie historique, passage des Petites Ecuries dans le 10e, en mai 1968, prémice d’un empire qui compta une quarante d’unités quelque quarante ans plus tard. Mathieu Bucher, à 35 ans, possède déjà quatre maisons: le River Café à Issy-les-Moulineaux, le Murat dans le 16e, porte Auteuil, le Café de la Jatte à Neuilly, enfin le Gallopin place de la Bourse. Créée en 1876, entièrement rénovée avec ses stucs, ses boiseries, ses vitraux, cette dernière maison correspond bien à l’esprit de son père. Le directeur – et partenaire associé du lieu -, Paolo Abate, travailla d’ailleurs dix ans, dans le groupe Flo au Vaudeville. Mais Mathieu Bucher qui a d’autres projets pour agrandir son petit empire, compte être plus éclectique que papa. Prochaine étape: un lieu contemporain prévu dans quelques mois.

A propos de cet article

Publié le 18 avril 2016 par

Les chuchotis du lundi: le divorce Robuchon-Magrez, Mamo à Paris, Maurey sort de l’ombre, Maximin quitte Cagnes, Faye joue double jeu, le Cygne rachète l’Arnsbourg, la mort-mystère d’Etienne Hugel, l’empire Bucher reconstitué” : 3 avis

  • Cher monsieur, je n’ai donné aucun détail sordide. J’ai été moi même ébranlé par le décès brutal d’Etienne Hugel, qui était mon ami, et j’avoue que je reste abasourdi par ce suicide dont personne ne semble vouloir parler, et qui est pourtant bien réel. On a été moins discret sur les décès, également volontaires, de Bernard Loiseau et Benoît Violier, avec qui j’étais également lié. Permettez-moi de m’interroger sur le fil de la vie qui se rompt ici de soi-même et qui laisse les autres interloqués. Tous nous questionnent sur le sens d’une existence souvent trépidante, par là même difficile à mener dans la pression, malgré la gaieté apparente. Etienne nous manque et nous manquera. Mes respects à lui et à sa famille.

  • T.PARENT

    M.Pudlowski, je suis choqué par les détails sordides que vous donnez concernant la mort de M.Hugel! Un grand Monsieur qui mérite un peu de respect… Vous ne faite pas votre travail de journaliste en spéculant et colportant de telles rumeurs! La quête de la petite phrase et du buzz pour faire parler de votre blog… Faut certainement que vos sponsor y retrouvent leur compte mais pas au point de vendre votre « déontologie » de journaliste!

  • HP

    Je suis heureux d’avoir pu diner dans le restaurant joint-venture de Robuchon-Magrez a Bordeaux. C’est un restaurant exceptionnel, du niveau des toutes meilleures tables francaises ou europeennes. J’espere de tout coeur que l’aventure ne s’arretera pas la et que Joel Robuchon pourra le reprendre et obtenir les 3 etoiles qu’il y merite.

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