Lancement aujourd’hui de mon neuf Pudlo Bretagne (Michel Lafon/Le Télégramme). Pour vous en donner un avant goût, voici la préface.

« Elle est à part, butte contre l’océan, prend l’eau de toute part, surfe les vagues de toutes les modes et ne cesse jamais d’être elle-même. Elle a engendré une nouvelle génération de chefs à son image : des jeunes bûcheurs, modestes, rigoureux, mettant en avant les produits de la terre comme de la mer. Elle, qui nous a fait plaisir jadis avec les Roellinger, les Thorel, les Jeffroy, les Guilloux, les Bellin, les Crenn, les Vétélé, les Abadie, nous redonne à voir le monde comme il va avec des petits gars fortiches, comme Sylvain Guillemot, wonderboy du Pont d’Acigné à Noyal-sur-Vilaine près de Rennes, formé jadis chez son compatriote Passard à Paris.

Ils sont nombreux, comme lui, désormais, à prendre leur Bretagne à bras le corps pour leur faire rendre un son autre, raconter les produits vertueux de leurs artisans de cœur. Prenez un vieux maître venu de Vendée, tel Bernard Rambaud au Pressoir de St Avé près de Vannes : ce breton d’adoption depuis trente ans n’a pas son pareil pour marier homard et tête de veau, nous faire saliver avec un kouign patatez et une réduction de vin rouge aux sucs exquis.

Bretagne délicieuse et savoureuse : ses nouveaux chefs, qui réinventent sa cuisine puisant aux meilleurs sources, ont engendré des jeunes loups qui créent à leur tour des bistrots affables (connaissez vous l’Entonnoir rennais d’Anthony Martin et Mélanie Debord ?), des fous cuisinant avec passion (comme le nantais Alain Ruffault de L’Atelier d’Alain), se révélant aubergiste jovial et bonhomme (comme Eric Vigoureux aux Oliviers), hôtelier écolo et cuisinier bio d’exception (tel Gilles Le Gallès à la Gréé des Landes de la Gacilly) ou hôtelier formidable dans l’un des plus beaux sites du monde (Bertrand Jacquet du merveilleux Domaine de Rochevilaine à Billiers sur la pointe de Pen Lann).

« Bretagne est univers », disait Saint-Pol Roux. Mais univers gourmand, a-t-on envie d’ajouter. Surtout quand on a goûté les chocolats de Christian Hénaff à Brest (C Chocolat), les pâtisseries de Laurent Le Daniel à Rennes, les pains de Boris Calle chez Augustin, les fromages de Régis Lecoq, les huîtres Tsarskaya des Parcs St Kerber à Cancale. Les meilleurs crustacés du monde (homard bleu, langouste rose, demoiselle du Guilvinec, saint-jacques d’Equy), les poissons de ligne les plus fins, les meilleurs légumes, l’exceptionnel cochon fermier, le cidre et la fine : voilà donc ce que l’on trouve ici, avec le beurre salé, les crèpes, le far et le divin kouign amann.

Ajoutons qu’en Bretagne, c’est toujours moins cher qu’ailleurs à valeur égale. Qu’on n’a pas l’impudence ici de faire payer plus cher le bon, et même l’exceptionnel, que ce qu’il convient. Notre rapport qualité-prix de Vertou (Jean-Luc Senée du Monte Cristo) en témoigne, comme notre nouveauté de l’année (Morgane Le Meur et Julien Daunat du Castel Beau Site de Ploumanac’h) ou encore un briscard de talent, Jacques Faby, qui, au Cours des Lices rennais, près du marché, fait, après des années au Four à Ban, un come-back de classe.

Si vous avez lu cette préface jusqu’au bout, c’est que vous êtes un fidèle du Pudlo Bretagne qui signe là sa 4^e édition, sachant que cette région phare braque ses lumières scintillantes sur la qualité tout azimut. Comme sa cousine, l’Alsace, juste de l’autre côté de la France et juste en face, elle a fait de l’hospitalité sa raison d’être. Son souci : faire admirer ses sites, ses petites cités de caractère, ses vieux cœurs de ville, ses ports, ses belles forêts, comme ses collines herbeuses avec une communicative passion. Aimez la Bretagne, faites la aimer et sachez que sa cuisine, qui est désormais l’une des meilleures du monde, est aussi sa plus belle ambassadrice. »