A Mere
« Paris 10e: ceci est un restaurant moderne »
C’est un ex restaurant asiatique et vietnamien, spécialisé dans le bo bun – d’où l’amusante enseigne (provisoire?) à la Magritte. Ce qui prouve l’humour de l’équipe: le chef brésilien d’origine, Mauricio Zillo, qui n’a fait que de grandes tables en Espagne (Arzak, El Raco de Can Fabes), en France (Bocuse, Alléno, Auguste), au Brésil (DOM d’Alex Atala), le sommelier Mikaël Grou, ex du George V, plus leur associé Juan Arbelaez qui toujours florès à la Plantxa de Boulogne.
Le décor est minimaliste, les serviettes sont en papier, les tabourets assurent le confort minimum – mais on assure que le changement en cours. Côté cuisine, cela file en tout sens, au gré de menus séquentiels genre « cuisine slash »: raie, haricots blancs, poireaux, avec une jolie vinaigrette sapide, sous des feuilles de chêne, saint-jacques, oignon rosé et poire, pintade avec puntarella, pamplemousse et purée de lentilles donnent une idée légère, plaisante de ce qu’on trouve là.
Le plat raté du moment: le brocard (autrement dit le chevreuil, hélas présenté archi-cuit donc duraille), avec huître (mais on se demande vraiment où elle est passée) et une crème (un peu lourdingue) de raifort. Bah, tout le monde a droit à l’erreur. En guise de fromage, pomme, brocciu, chasselas, pourpier passent avec aisance, tandis qu’en dessert, kaki, pandoro (le pannetonne sans fruits secs), glace de foie gras et crème de marron surprennent en bien.
On glisse sur le choix de vins au verre malicieux: rouge Chora calabrais, les Grimaudes, signées Marc Kreydenweiss dans le Gard, tous deux séduisants. Bref, voilà un restaurant moderne, dans le ton de l’époque et d’un quartier – nous sommes en lisière de 9e, proche de la rue Richer et du Faubourg Poissonnière – qui se boboïse à fond la caisse. Intéressant, comme une découverte ethnographique.
Déjeuner de haut niveau des entrées au dessert. Service aux petits soins. Tout pour plaire. Merci à Maître Audouze qui nous a incités à nous aventurer rue l’Echiquier.