C’est à la fois un beau livre, comme une suite d’aveux, un témoignage, un credo, une leçon de vie. Eric Beaumard, dont Nicolas de Rabaudy dresse un fort joli portrait en liminaire, aurait pu être cuisinier de talent si un accident ne l’avait pas privé de l’usage d’une main. Il deviendra un grand sommelier, d’abord à la Poularde à Montrond-les-Bains, ensuite au George V où il survivra à plusieurs chefs, tous tutoyant l’exception, Philippe Legendre, Eric Briffard, aujourd’hui Christian Le Squer et à plusieurs directeurs, dont Didier Le Calvez, Christopher Norton et, présentement, José Silva. Autant dire qu’il assure la continuité d’un lieu hors norme, jouant les sages, dirigeant le Cinq, gérant la cave, racontant les vins du monde avec une ferveur exceptionnelle. Ce livre-ci est comme le bilan d’une vie. Les vins, mais aussi les bières, cidres, liqueurs, sont convoqués comme des escortes, des compagnons, des complices. Leurs producteurs sont vite évoqués comme des amis, des conducteurs d’émotion, des dicteurs d’anecdotes. Les domaines livrent leurs histoires. Les noms sont des révélateurs. Dagueneau, Ostertag, clos Rougeard, la Mission Haut-Brion, la Romanée Conti, Rayas ou Fargues: voilà des titres de chapitres d’une existence riche en découvertes, voilà des paragraphes qui se lisent entre les lignes, se boivent les yeux fermés. Les vins de ma vie: une ode à la vie signée Eric Beaumard.

Les vins de ma vie, d’Eric Beaumard, photographies de Fabrice Leseigneur (La Martinière, 576 pages, 39,90 €).