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Lameloise

« Chagny: avec Eric Pras, la saga Lameloise continue »

Article du 10 décembre 2010

Eric Pras devant la façade de Lameloise © GP

C’est une bonne nouvelle pour toute la Bourgogne et pour la France qui mange et aime manger: la maison Lameloise continue. Sur la belle place d’Armes discrète de cette cité de Saône et Loire sur la route de Beaune à Chalons, on poursuit le mouvement des choses. Il y avait jadis l’Hôtel du Commerce. lancé par Pierre Lameloise, dans un relais de poste du XVe siècle, non loin de la N6, du chemin de fer PLM et du canal du Centre, en 1920, qui obtient l’étoile chez Michelin en 1935. Puis fut relayé par son fils Jean, formé au Royal à Chalon et à Paris au Plaza-Athénée, puis au Scribe, qui propose les quenelles de brochet, la truite au montrachet, les écrevisses en nage, la quenelle de brochet et le coquelet en pâte sauce Janick, créée pour la naissance de sa première fille.

Ambiance d’une salle

En 1960, Jean et son épouse Simone imaginent un hôtel moderne et baptisent la maison à leur nom. La salle à manger voûtée, avec ses grilles et ses poutres, fait le coup du charme, sous forme de caves bourguignonnes revisitées. Le choix de vins, représentatif des trois côtes, de Nuits, de Beaune, mais aussi la chalonnaise, dont Chagny est la porte, se développe. Jacques naît dans l’hôtel de ses parents en 1947, démontre vite son goût des farces, repeint de frais l’échelle du peintre de la maison, quand celui-ci déjeune, ou verse de l’huile sur le carrelage de la cuisine. Mais le sérieux l’anime lorsqu’il est aux fourneaux. Il se forme, rigoureusement, à l’Aubergade à Pontchartrain, au Lucas Carton, place de la Madeleine à Paris, chez Lasserre et au Fouquet’s, sans omettre, comme son grand-père, le Savoy à Londres, à l’école Escoffier. Lorsqu’il revient chez lui, en 1971, il n’oublie pas les bases classiques, mais décide d’innover avec sagesse et d’alléger avec constance.

Le sommelier Hubert Gaillard © GP

Stagiaire aussi, en pâtisserie, chez Lenôtre, il va se révéler un fortiche du genre. D’où ces balancements perpétuels chez lui entre tradition et novation, produits régionaux de qualité et plus lointains au mieux de leur fraîcheur. Il obtient deux étoiles en 1974, enfin trois en 1979, en même temps que son copain Gérard Boyer de Reims. La réussite de la maison, c’est aussi le travail de Nicole, sa souriante épouse aux beaux yeux bleus, qui veille, bonne fée, sur la cinquantaine de personnes du service, entre femmes de chambres et maîtres d’hôtel, embellit les chambres à l’ancienne, avec leur plafond à la française, leurs meubles de style, leurs salles de bain en marbre.

Chou farci de foie gras © GP

Je passe sur la suite, les trois étoiles de 1979. Leur perte, leur retrouvaille. La maison, Relais & Châteaux depuis 1990, a gardé sa gloire, son charme, son aura. Elle a été reprise par son neveu Frédéric Lamy et son successeur en cuisine, le MOF Eric Pras. Ce natif de Roanne, formé chez Troisgros, Gagnaire, Marcon, a du coffre, de l’esprit de sagesse, du métier. Il continue dans sa lignée. Le personnel, qui a souvent trente ans de maison est aux aguets. Les chambres, avec leurs salles de bain en marbre, ont du charme. La maison se double aussi d’un bistrot déluré (« Pierre et Jean ») en hommage aux deux pères fondateurs. Mais Eric oeuvre à perpétuer le style Lameloise jouant sagesse classique, esprit de terroir, rigueur technique, choix savant de bons produits, exécution sans faille, tandis que le sommelier Hubert Gaillard propose le meilleur de la côte chalonnaise aux gens d’ici et du monde entier, venus là se faire fête.

Omble chevalier mariné et fumé © GP

Le chou farci de foie gras en amuse gueule, l’omble chevalier des Cévennes, marbré et fumé aux sarments de vignes, nappé d’un lait mousseux aux noisettes, avec quelques grains de caviar d’Aquitaine et un crémeux d’artichaut, comme la tarte fine d’escargots (de Bourgogne, évidemment), avec sa potagère d’herbes fraîches, ses légumes du moment, son ail onctueux et marinés font des entrées en matière délicates et fraîches. Le Parmentier de homard, avec ses chanterelles et truffes de Bourgogne, le filet de boeuf de Charolles (AOC), poché/rôti, façon « à la ficelle », dans un léger consommé au poivre de cassis avec un cannelloni d’effilochée de queue de boeuf sont du travail d’artiste.

Fine tarte aux escargots © GP

Les desserts furent toujours là une partie forte. Ils le demeurent avec cette variation sur le thème du café (crémeux, émulsion tiède cannelle cassia, plus croustillant de Gianduja noisette) qui éclate en bouche comme du velours. Glissez là dessus le rully du moment (celui de Dureuil-Janthial) comme le merveilleux givry de François Lumpp et vous comprendrez qu’il ne faut pas tarder à reprendre le chemin de cette belle demeure haute en saveur, couleur, histoire, qui n’a jamais démérité de son prestige et demeure au sommet de son rang.

Filet de boeuf rôti/poché © GP

Lameloise

34, place d'Armes
71150 Chagny
Tél. 03 85 87 65 65
Chambres : 115-295 €
Menus : 75 (déj., sem., vin c.), 97, 150 €
Carte : 100-130 €
Site: www.lameloise.fr

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