Restaurant Mathieu Pacaud - Histoires

Mathieu Pacaud © GP

Il y avait Hexagone, il y a désormais Histoires. Un lieu secret, caché, qu’on découvre en poussant une porte, en tirant un rideau, en découvrant une salle à manger comme un miroir déformé, avec sa table mise en scène en liminaire. Un lieu artiste? Bien sûr! Mathieu Pacaud, qui ne fait rien comme les autres, s’est amusé à construire son « Alice au pays des Merveilles » ou plutôt la suite façon « ce qu’Alice découvrit de l’autre côté du miroir« , comme dit Lewis Caroll.

La salle © GP

Autant dire que le lieu, déjà mythique, car tant attendu – il a ouvert discrètement hier… – est une sorte de conte à tiroirs, un recueil de nouvelles à effeuiller avec malice, à saisir en douceur. Chaque plat se raconte et se lit. On croit que l’on va découvrir telle recette, tel produit. Et l’assiette sera autre. Belle, savoureuse, parfois riche lorsqu’elle est déclinée à l’envi, quoique toujours passionnante.

Un coin de table © GP

Il y a là de beaux produits, de belles mise en bouche, d’admirables condiments, des mets qui valsent, virevoltent, séduisent, sous la houlette du chef maison Julien Lefebvre. Bref, c’est de la cuisine comme de la haute voltige, à faire réviser son latin, ses gammes littéraires, ses anthologies poétiques et surréalistes comme son… guide Michelin.

Langoustines et caviar © GP

Un lieu à voir, autant qu’à déguster, avec ses instants de grâce et ses poses agiles ou forcées. En entrée, composée d’écrevisses pattes rouges mariées au cassis de Bourgogne ou langoustine royale et caviar golden avec fleur de fenouil anisée: petites assiettes colorées et vives, qui se répondent et se complètent.

Ecrevisses et cassis © GP

Puis darne de turbot en croûte de sel aux agrumes corses (un hommage conscient ou non,, délicat et contrasté aux origines bretonne et corse des parents Bernard et Danièle…). Et l’insolite flamenkuchen de dos de sole avec comté et cèpes (exquise avec ses grosses cèpes en annexe et un peu culottée avec sa mini-tarte flambée soufflée).

Flammenkuchen de sole © GP

Enfin, la volaille de Bresse rôtie avec romarin et marjolaine d’une précision de goût sans faille, net, fine, sans bavure, comme une ode offerte à dame Tradition. Certes, il n’y a là que vingt couverts, les prix volent haut, mais le jeu en vaut la chandelle et le lieu le voyage.

Turbot aux agrumes corses © GP

Les vins (corton charlemagne de Bonneau du Martray grandiose en 2006, mieux que le château Beychevelle en bout de course en 1990) jouent crânement le haut niveau. Le personnel est aux aguets, la mise de table d’un raffinement sans faille, le jeu des assiettes ordonné avec allure et rigueur. Bref, voilà une demeure qui entend tutoyer les étoiles…

Volaille de Bresse © GP

Les desserts  ne déçoivent pas. Avec, en liminaire, une formidable, même si on n’est guère adepte du genre légumier, sorbet concombre sur sa fine compotée de fruits rouges, une bien jolie ronde des cerises noires acidulées avec réglisse, plus estragon ou encore une splendide arlette de fraises des bois au citron et basilic, qu’escorte avec une bouleversante glace vanille turbinée. De quoi faire se tortiller la langue de plaisir.

Arlette de fraises des bois © GP

Un seul mot: si vous êtes gourmet, gourmand, et un tantinet curieux de ce qui se mijote à Paris côtés mets et côté méninges, voilà la bien la table de l’heure à visiter en hâte. Bref, réservez, il y aura du monde !

Sorbet concombre et compotée de fruits rouges © GP