Hostellerie de l'Abbaye de la Celle
« La Celle-sur-Var: une thébaïde sudiste côté Est »
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De cette belle hostellerie, jouxtant une abbaye romane du XIIe siècle, avec sa haute façade aristocratique dans les tons ocres, son beau jardin, ses rangées de vignes, ses multiples cépages, comme un conservatoire des vins d’ici, ses plaisirs gourmets, notre correspondant azuréen Alain Angenost vous a tout dit ou presque. Ce que l’on sait moins, c’est que la belle table de la demeure est administrée avec brio par des gens de l’Est.
Aux commandes des fourneaux, Benoît Witz, natif de Colmar, élevé à Elsenheim, près d’Illhaeusern, au coeur du Ried, a été formé en Alsace. Ce chef discret, sûr et modeste travaillé chez François Kiener au Schoenenbourg de Riquewhir avant de participer à l’ouverture du JYS aux côtés de Jean-Yves Schillinger dans sa cité natale, avant de participer à l’aventure ducassienne, à Monaco, à Moustiers, puis ici même dès l’ouverture en 1999.
Benoît, actif aux fourneaux, jonglant avec les ingrédients de Provence, avec un mélange savant de fougue et de dextérité, est relayé en salle par le Bitchois Xavier Schneider, passé au Strasbourg de Lutz Janisch, dans sa ville d’origine, puis à l’Ami Fritz d’Ottrott, avant de rallier, lui aussi, le groupe Ducasse et le sud avec aisance. Nul doute que la note de sérieux et de rigueur, qui a trait à ce qui est ici servi, leur doit beaucoup.
Ce qu’on goûte là, au jardin, à travers des menus malicieux et tentants, est le reflet des belles idées de saison du moment. Ainsi la bonite du littoral en escabèche au safran provençal, les morilles brunes aux asperges vertes locales, les jolis légumes de printemps en barigoule avec brousse de Rove et coriandre, effeuillée de morue aux pois chiches de Rocbaron et condiments aux amandes ou encore saint-pierre de Méditerranée aux courgettes et tomates confites sont de l’or en barre.
On peut varier les plaisirs avec le poulpe de roche au citron confit (joli mariage!) en fraîcheur, des artichauts violets et de la bourrache, encore le quasi de veau avec son ris en cocotte, ses pommes de grenailles et son jus à la sauge. Sans omettre, in fine, le si fin millefeuille aux premières fraises avec sa crème vanille à se mordiller la langue.
Les vins suivent, comme le séducteur rosé du château de la Calisse signé Patrica Ortelli, issu de pressurage direct. Les salons ont du caractère, les chambres sont toutes délicieuses, notamment celle qu’occupa jadis le Général de Gaulle ici même. Bref, voilà une thébaïde gourmande et sudiste, mené avec allant par des gens de l’Est, qui mérite bien qu’on y fasse retraite.