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Le repas des Français classé: cocorico ou esbroufe?

Article du 17 novembre 2010

Alain Guignard, pâtissier à Arcachon © Maurice Rougemont

Cocorico! L’Unesco vient de classer le « repas gastronomique des Français » au patrimoine immatériel de l’humanité, reconnaissant ainsi que les Français ne mangent pas comme les autres. « Un repas, surtout de fête, est toute une affaire, avec une préparation et des rituels, inscrits dans la culture populaire« . On le savait. Mais les Italiens, qui possèdent au moins autant d’AOC que nous,  vantent leur truffe blanche d’Alba, comme la noire de Norcia, le risotto Carnaroli, l’Arborio ou le Nano, les pâtes sèches de Gragnano près de Naples ou de Lari dans les collines pisanes, l’huile d’olive de Toscane, comme de Ligurie, les lentilles de Casteluccio, le veau fassone du Piémont, le jambon de Parme et de Langhirano, celui de San Daniele, comme le culatello de Zibello, les petites tomates des Pouilles, la mozarella de Campanie, chez qui un repas s’énonce toujours en plus de trois parties (antipasto, primo piatto, secondo, dolce) pourraient bien en demander autant.

Et je vois déjà l’Espagne pointer sa corne avec ses pinxos comme à San Sebastian, ses tapas andalous, son jerez et sa manzanilla de là-bas, son merveilleux jambon iberico, son sublime pata negra. Et à quand le classement pour le Japon des sushis bar, pour le Maroc du rite de la diffa, du couscous et de la pastilla, pour la Chine du canard laqué, des dim sum et des sauces aigre douces. Bref, j’arrête là l’énumération possible, avec un clin d’oeil au Vietnam (vive le phô, les bo bun et le banh cuon!), à la Thaïlande (dont on adore le thom ga kaï et le thom yum kang)… en me disant que le chauvinisme pourrait nous faire pousser des ailes, si nous n’étions pas lucides.

Merci donc l’UNESCO. Mais si seule la France a droit de classer son patrimoine culinaire, est-ce à dire que la cuisine des autres est moins gourmande, moins savoureuse, moins conviviale, bref moins authentique que la nôtre? Evidemment pas! Ou, comme dirait Alain Guignard, pâtissier à Arcachon, qui défend si joliment le cannelé bordelais: »mon oeil »! (cf ci dessus). Mais profitons en pour mieux encore nous faire connaître!

Les ministres de l’Agriculture Bruno Le Maire et de la Culture Frédéric Mitterrand ont d’ailleurs affirmé qu’ils allaient se servir de ce levier « pour valoriser les produits alimentaires et les savoir-faire culinaires, encourager le tourisme gastronomique sur nos territoires et développer la promotion du patrimoine alimentaire français à l’international« . Merci à eux et bienvenue en France!

A propos de cet article

Publié le 17 novembre 2010 par

Le repas des Français classé: cocorico ou esbroufe?” : 4 avis

  • Cassandra

    Pas de cocorico! L’Unesco a classé en même temps que le repas gastronomique français:
    – la cuisine traditionelle mexicaine (pays ou j’ai fort mal mangé)
    – La diète méditerranéenne, dossier déposé par l’Espagne, la Grèce, l’Italie et le Maroc
    – le pain d’épices en Croatie du nord (!)

    Il y avait des grandes lacunes dans la communication de la candidature française: Un certain nombre de chefs semble croire que leur cuisine est désormais un patrimoine de l’humanité. Mais passons.
    Ce qu’il pose un réel problème, c’est le classement d’un seul produit/ une recette (pain d’épices) comme patrimoine de l’humanité:
    En 2012 au plus tard, tout pain d’épice et bière allemande, tout Tom Yang khun thailandais et tout lentille italienne seront protégés…. et la production industrielle sera vendu avec label Unesco.

  • Je pense que cela peut être une bonne chose si l’on exploite cela à bon escient et effectivement sans chauvinisme ou arrogance (à la française). Si nos ministres veulent en profiter pour valoriser les savoirs faire culinaires, il faudrait commencer par augmenter les heures de pratiques culinaires dans nos écoles hôtelières par exemple…

  • Libre à vous de pousser un cocorico gourmand. Libre à moi de penser qu’il est déplacé. A moins que l’Italie, l’Espagne, la Chine, le Maroc, le Japon…

  • (…)Pourquoi ne pas « savourer » la reconnaissance internationale de ces moments de convivialité qu’on ne saurait passer en France, autrement qu’autour d’une table ?
    La fierté tricolore est-elle réservée aux supporters fanatiques qui hurlent dans les stades ?
    Merci à l’Unesco de célébrer ainsi, le plaisir de partager ensemble les inimitables saveurs de notre terroir
    (…lire la suite sur mon blog !)
    Petitgrognon

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