Caméléon d'Arabian

Jean-Paul Arabian et le service © GP

C’est le même, mais c’est un autre, encore plus râleur, encore plus mégalo, s’étonnant toujours de son absence d’étoile – alors que Michael Ellis, le big boss du guide rouge vient se faire fête régulièrement chez lui. Son bistrot coloré, joli et savoureux, joue volontiers l’Ami Jean-Paul du 6e, comme il y a l’Ami Louis rue du Vertbois. « Produits de très grande qualité, fait maison », annonce à la carte, au cas où l’on n’aurait pas compris. Le (merveilleux) foie de veau dit « châteaubriand de foie de veau français« , cuit épais, déglacé au vinaigre de vin, servi avec son (splendide) gratin de macaroni au parmesan est à 45 €, mais c’est le meilleur de Paris!

Museau © GP

Le ris de veau en casserole en écailles de truffes et pommes de terre est, lui, à 53 €. Les assiettes de porcelaine sont signées Bernardaud. Le formidable museau de cochon avec vinaigrette à la moutarde et condiments est, lui, à 15 €. Et c’est bien la Rolls des entrées canailles. Bref, Arabian, version aubergiste de luxe, est à la fois câlin, drôle, généreux, avec ses formules de déjeuner à 33 € (entrée+plat ou plat+dessert) et 39 (la complète) € au déjeuner.

Oeuf et truffe © GP

Son chef, David Frémondière est un artiste des sauces légères, des cuissons courtes, des mijotages, jouant l’art ménager avec allant. Pressé de queue de boeuf au foie gras, soupe de moules façon Billy By, incroyables truffes noires râpées avec jaune d’oeuf sur sa légère purée de pommes rattes truffées, haddock au beurre citronné avec ses épinards en branche et ses pommes anglaises sont des chef d’oeuvre d’art ménager.

Haddock poché © GP

Comme les saint jacques aux endives, le renversant Parmentier de joue de boeuf, le pot au feu avec son bouillon ou ces desserts de grand-mère comme le tout noir Valrhona au chocolat, l’ananas rôti au miel caramélisé avec  sa crème glacée à la vanille et la poire et caramel avec sa pana cotta et son sorbet.

Pot au feu © GP

Ce bistrotier râleur au grand coeur, qui fait goûter un condrieu ou un charmes chambertin comme on se joue, rédige sa pièce au jour le jour, réinvente sa vie comme une scène de théâtre. On l’a connu jadis à Lille au Restaurant deux fois étoilé, puis chez Ledoyen avec la grande Ghislaine, enfin chez Pierre au Palais Royal. Le grand acte IV de son existence de baladin funambule qui s’écrit rue de Chevreuse charme a mezza voce. Vrai, il est difficile de ne pas aimer cet emmerdeur de génie.

Ananas caramélisé © GP