Au Cygne
« Gundershoffen: un ban pour les Mengus »
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Ils ont fait leur pelote en trois ans, sont devenus les seigneurs de Gundershoffen, à la croisée des chemins des Vosges du Nord et du pays de Nord, non loin de la zone d’activité de Merzwiller, dans un lieu qui devient, sur une circonférence minime, le plus gourmand d’Alsace et des lisières lorraines. De Baerenthal à Lembach, de Morsbronn à Obersteinbach, sans oublier Merkwiller-Pechelbronn et Hegeney, la nouvelle Alsace qui mange avec acuité est bien là.
Les Mengus, Laure et Fabien, ont donc repris la maison des Paul, refait du Cygne un lieu chic, sobre, distingué. Le cadre a été revu avec distinction, le service a des grâces complices, la carte des vins recèle de belles trouvailles à tous les prix et les menus sont ici des invites. Fabien, qui n’a que 33 ans, fut formé jadis chez les Golla de Niederschaeffolsheim – guère loin non plus -, a travaillé trois ans avec François Paul, comme second, joue ici sa carte personnelle.
Le nouveau Cygne? Fin et frais, alsacien, certes, mais dans le vent de l’époque. Il y a toujours la façade bleutée avec son colombage soigné, l’intérieur aux teintes adoucies avec sa fresque en trompe l’oeil de Malher, les tables bien mises, la belle verrerie, les jolies assiettes, et cette cuisine qui va de l’avant sans renier ses racines.
Le menu dit »saveur » à 70 € donne une belle idée de ce qui se propose là entre tartare de quasi de veau, déclinaison de patate douce, sorbet au cornichon ou effilochée de tourteau au gingembre et estragon, quinoa au noix de macadamia, vinaigrette aux agrumes, avant le cappucino de homard, le dos de bar en raviole ouverte, au fenouil, coques, couteaux, jus de coquillages ou le chapon en cuisson longue avec purée de carottes, chou rave au curry torréfié, croustillant de blettes, jus réduit au pinot noir.
C’est savant, fin, précis, énoncé sans chichi en assiettes nettes et rectilignes. Ainsi les propositions du menu « gourmand » à 90 €, qui offre, avec un plat de plus, oeuf parfait (62°) avec crème de marron, mousse de topinambours et truffes, aiguille de saint-pierre avec palet de céleri à la noisette et noix laqué au comté, plus endives carmine (façon chicorée de Trévise), graines de passion, émulsion au pain grillé et encore mignon de cerf aux épices doices, compotée de betteraves rouges acidulées et rutabagas confits.
Parfois complexes, riches, mais juste ce qu’il faut et sans chichi, ces mets mettent de beaux produits d’ici et d’ailleurs en relief. Et les vins nets d’une cave abondante, comme ce riesling les Pierrets, rond mais sec, de Josmeyer et le rubicond givry de Lumpp jouent les accompagnements précis et sans emphase.
Les desserts (forêt noire revisitée avec jus de griottes et glace au kirsch ou poire Belle Hélène nouvelle manière, pochée à la vanille, sauce chocolat coulant, streusel au grué cacao et orange et glace vanille) signé d’un ancien pâtissier de l’Arnsbourg joue la tradition revue en légèreté. Et toute la maison est à l’unisson.
Il y a l’accueil de Laure qui s’est coulé dans son moule d’hôtesse alsacienne avec un naturel confondant, comme la partition gourmande complète, des amuse-gueule créatifs aux mignardises gourmandes en rafale. Bref, ce carrefour gourmand de Gundershoffen joue bien son rôle de premier plan côté Alsace du Nord.