Grander Restaurant
« Wattens: les belles idées de Thomas Grander »
Il est le petit voisin aimable de Swarovski dont il organise les dîners en tant que traiteur dévoué. Depuis dix ans à Wattens, son bourg natal, Thomas Grander est revenu à ses sources. Formé chez Gerrer au Bristol de Vienne puis chez Wörther au Schloss Hotel Prielau à Zell-am-See, il a retenu cette leçon que la bonne cuisine, c’est lorsque les choses ont le goût de ce qu’elles sont. L’adage est, bien sûr, de Curnonsky dont on pourrait aussi reprendre celui-ci: » je ne suis pas venu ici manger les rideaux« . De fait, dans une région autrichienne qui fait beaucoup dans le décor boisé de tradition avec fresques, il joue à contre voie avec un cadre moderne au charme peu évident dont on dirait, si l’expression n’avait déjà été utilisée, qu’il était démodé le jour de sa construction.
Peu importe, la cuisine est superbe, le service a du nerf, la carte des vins de la ressource et celle des mets de l’idée. On joue même ici la proposition à tiroirs au gré de mets changeants. Ainsi, en amuse-gueule, le foie gras accordé, le saumon mariné aux betteraves, le thon au concombre, puis les idées qui fusent et rusent. Comme les betteraves rouges et jaunes au fromage de brebis, le sandre en soupelette aux topinambours, le tartare de boeuf bien assaisonné au jambon ibérique et purée de pommes terre aux truffes blanches, la saint-jacques à la citronnelle et son bouillon de champignons, le sorbet concombre pour digérer, le chevreuil à la crème de topinambours, haricots et cèpes.
On arrose le tout de vins des régions voisines, comme ces frais rieslings du Kremstal ou de Basse-Autriche (Fritz, Dolle), ces grüner veltliner de la Wachau (Jamek) ou ce chardonnay de Vienne (Wieninger) dont sa carte abonde et on achève sur des desserts frais comme l’onde, tels les fruits exotiques, mangue et passion, au sorbet coco, ou la splendide tarte Tatin avec son onctueuse glace vanille. Bref, et on l’a saisi, ce chef bûcheur et sérieux vaut nettement mieux que l’unique toque et ce pauvret 13/20 dont le Gault-Millau autrichien, qui trône, en l’absence du Michelin, ici l’afflige. Venez faire le détour pour goûter Grander et sa grandeur, en pardonnant ce mauvais jeu de mot qui s’impose.