Eleven Madison Park

En salle © GP

C’est le dernier des trois étoiles new-yorkais: une maison d’une belle distinction sise dans une ancienne banque, contiguë du Crédit Suisse. Un signe? Aux commandes: Daniel Humm, natif de Strengelbach en Argovie, formé au Baur au Lac à Zurich, passé au Pont de Brent à Montreux, émigré aux USA d’abord sur la côte Ouest au Compton de San Francisco, placé au Eleven Madison Park par la malice de Danny Meyer de l’Union Square Café et désormais chef-patron de la demeure.

Le chef Chris Flint © GP

Une équipe rodée sous sa houlette, avec le chef local Chris Flint, en bon exécutant, ordonne la danse d’un menu unique pour tous. La salle est théâtrale, le service l’est aussi. Et, hormis une sommelière un brin empotée, peu diserte, en tout cas peu incline à vous proposer « la » bouteille qui conviendra à votre repas, la danse des saveurs joue le ballet parfait. Certes, à voir ânonner chaque met aux tables voisines, sachant qu’ensuite ce sera son tour, on se dit que l’exercice est un brin répétitif. Mais pourquoi pas?

Courge en linguine © GP

Foie gras pané aux champignons © GP

Pastrami au pain de seigle © GP

Fins, savants, parfois amusants sont les plats proposés façon oeuvres d’art. Le cookie aux airs de macaron en noir et blanc au cheddar à la pomme, ensuite le  bouillon de canard au pain, beurre et sel, courge en linguine avec poire, châtaigne et radis, le foie gras de la vallée d’Hudson mariné aux raisins avec chapelure de champignons genre sucré salé (un poil trop salé d’ailleurs), le sandwich new yorkais revisité au pastrami et pain de seigle, poireaux et pommes de terre, en hommage à l’une des grandes gourmandises locales, accompagné d’un soda de votre choix (érable, airelle, pomme ou céleri): voilà qui frise le gadget.

Fruits de mer de Long Island © GP

Turbot à l’encre © GP

Bouillon de champignon © GP

Vous pigez l’esprit du lieu, qui tient autant du spectacle que de la gourmandise. Il y a encore l’éventail de fruits de mer de Long Island : huitre au yaourt et citron, saint jacques pistache et pomme, crabe bleu avec radis mariné, vichyssoise au caviar, maquereau et oeuf de caille, bar lentement cuit aux palourdes, calamars et son encre, sauce persillée, champignon dit « crinière de lion » braisé dans son bouillon, enfin l’assortiment de charcuteries – saucisse, pâté de foie et poitrine-, avant le morceau de bravoure du repas du jour:  magret de canard des Finger Lakes rôti aux pommes, rutabaga et jus d’épices d’automne. Les chefs commis sortent de la cuisine à l’occasion pour suppléer le service, expliquer la genèse d’un plat.

Les cuisiniers en salle © GP

Charcuterie de canard © GP

Magret aux pomme et rutabaga © GP

Les desserts jouent sur le même ton, entre spectacle et gourmandise: sorbet au petit lait caramélisé et mousse de lait, classique omelette norvégienne flambée au rhum, avec caramel et sirop d’érable, bretzel au chocolat et sel de mer, enfin cookie noir et blanc à la mélasse de pomme. On a accompagné le tout d’un pinot noir de l’Oregon Mc Kinlay 2008 de la vallée de Willamette, fruité et charmeur, quoiqu’un peu « court sur pattes » pour un tel déferlement de saveurs. Mais, on l’a dit, le conseil des vins n’est pas le point fort de la demeure.

Flambage de l’omelette norvégienne © GP

Reste que l’expérience vaut la chandelle et la soirée appliquée, offrant un joli coup d’oeil de la neuve gourmandise studieuse du New York nouvelle vague. Mais pour les trois étoiles, glissons que c’est une autre paire de manches…

Sorbet au petit lait © GP

Omelette norvégienne © GP