La Grange de Condé
« Condé-Northen: Visilit, aubergiste lorrain exemplaire »
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Il est le plus valeureux des aubergistes lorrains, royal dans son domaine, haut de taille, rond et rubicond de silhouette. Un jour que je lui fis la remarque sur son tour de taille, lui conseillant un régime, il me répondit tout à trac: « non, avec ce que je fais comme cuisine, les gens ne comprendraient pas« . Tout Jean-Marie Visilit est dans cette formule lapidaire: généreux, solide, enraciné, fidèle à lui-même et à son terroir. Ce natif de Woippy, passionné de cuisine en autodidacte aguerri après son bac, élève studieux de l’école hôtelière de Glion, jeune étoilé aux Belles Rives à Remich, débauché au Grand Hôtel du Golf à Crans-Montana, puis chef étoilé encore au Relais de Margaux, est revenu jadis dans la ferme de sa grande tante, au cœur de la vallée de la Nied, non loin de Boulay, à une vingtaine de kilomètres de Metz, établir son domaine.
Quand d’autres pleurent misère et se retrouve esseulé à la campagne, Jean-Marie Visilit exulte, remplit ses salles, fait se pâmer les visiteurs devant ses rôtissoire, sa cheminée, jouant la cuisine à l’ancienne avec légèreté. La course aux étoiles? Cela fait longtemps qu’il l’a remisée au placard. Depuis vingt ans bientôt en sa grange de Condé, cet aubergiste lorrain exemplaire conte les recettes qu’il aime, agrandit son domaine, s’amuse à recevoir comme à la maison ses clients traités en amis.
Il y a ceux qui viennent profiter des chambres et suites « Sissi » ou « Angélique » en duplex, fumer le cigare au salon, paresser au jardin quand le temps le permet, hésiter sur une carte abondante et prolixe entre les diverses propositions avenantes. Les produits? Ceux d’ici, bien sûr, et de guère loin, comme ces petits cochons de lait de la ferme Urbanzac à Diesen, ce fromage blanc et cette crème double de la laiterie d’Elvange, ces légumes, fruits, potimarron, courge d’automne, aubergines de printemps issu d’une ferme des lisières d’Ay-sur-Moselle, ce coquelet d’un volailler de Boulay – qui est, comme l’on sait, le pays des fameux macarons de la région dans leur boîte rouge.
Ces références au terroir s’accompagnent d’une attention portée à la tradition. Ainsi ces recettes anciennes remises au goût du jour, comme les terrines de lapereau aux noisettes, de gibier, ces joues et queues de bœuf aux légumes façon pot au feu, ces exquises grenouilles à la mode de Boulay, décortiquées savamment, proposées gratinées dans leur fine sauce crémée au vin blanc, relevée à l’estragon. Il y a encore la quenelle de brochet aux écrevisses en bisque gratinée, les filets de perche meunière des étangs de Moselle avec julienne de poireaux et céleri, beurre blanc, le rituel cochon de lait issu de la broche, avec sa peau craquante et sa chair tendre, si savoureuse.
On n’oublie pas le vol au vent de volaille poché avec sa béchamel parfumée à la noix de muscade, non plus que la côte de boeuf béarnaise. Mais on craque encore sur la crépinette rustico-chic, savamment canaille, de pied de cochon cuit au vin blanc des coteaux de Moselle, avec lentilles tièdes, jeune carotte, jus au pinot noir : craquant et si lorrain à la fois. Comme les fromages affinés d’ici, flanqués d’une salade au vinaigre de miel et d’un chutney de mirabelle. La mirabelle? Ce fruit d’or lorrain, parlons en encore, puisqu’il offre l’occasion du dessert vedette de la maison: un soufflé glacé à l’eau servi à bonne température, frais, fruité, moelleux à la fois. Bref, un rêve d’aubergiste et son aubergiste exemplaire à redécouvrir.
Bonsoir,
Pas une seule ligne sur « la voile blanche », la catastrophe de Monsieur VISILIT ?????